mercredi 9 novembre 2011

Démocratie contre Financiocratie

Après l’Irlande, le Portugal, et la Grèce, c’est désormais au tour de l’Italie de voir son chef de gouvernement quitter les manettes. La crise qui touche actuellement les pays européens, est donc sans pitié avec les politiques aux responsabilités. Pour les deux premiers cas, c’est la population, à travers des élections, qui a mis sur la touche les responsables gouvernementaux. Mais en Grèce, le départ de Papandreou n’est pas dicté par le suffrage universel. La mise en place d’un gouvernement d’union nationale, sans lui, est largement imposée par les partenaires européens d’Athènes et la pression des marchés. En Italie, la mise en minorité de Berlusconi a aussi été précédée par une intense pression de l’Europe et des marchés.

Un acteur influent
Quel que soit le jugement que chacun peut avoir sur ces chefs de gouvernements, Il est surprenant de constater que leur départ a toujours été impulsé par un acteur qui désormais ne se cache plus : le marché.
La finance a toujours été un acteur influent dans la sphère politique. N’oublions pas ce qu’est le nerf de la guerre. Mais ces dernières semaines révèlent un changement radical dans le positionnement des grands argentiers mondiaux par rapport à la chose politique. Finie la discrétion, finies les précautions. Les marchés ne sont plus de simples lobbies ou groupes de pressions travaillant dans les coulisses des assemblées. Ils sont aujourd’hui des décisionnaires de la politique, des acteurs puissants.
Naturellement, c’est la situation d’endettement des pays européens qui a permis à la finance de prendre indirectement le contrôle de la Grèce ou de l’Italie. Ces pays ont, comme un ménage surendetté, cédé les clés de la maison au créancier. Il ne faut donc pas s’attendre à ce que les changements de ces derniers jours aillent vers une politique destinée à relancer la croissance. Votre créancier ne vous aidera jamais à retrouver du travail…
La hausse des taux d’emprunt en Italie, au lendemain de l’annonce de la future démission de Berlusconi, révèle d’ailleurs que les créanciers n’ont pas forcément intérêt à voir Rome redresser la tête. Il a été reproché à l’Italie son manque de crédibilité. Aujourd’hui, c’est l’incertitude régnante qui est mise en avant pour justifier de l’attitude des prêteurs. Finalement, entretenir une ambiance de pseudo-crainte n’a pour résultat que la hausse des taux d’intérêts. Donc une hausse des profits. Des profits qui aujourd’hui sont quasi-garantis par le Fond de stabilité européen… Pourquoi s’en priver.

Conserver un minimum de souveraineté
Le bilan de cette situation est que les systèmes démocratiques sont aujourd’hui ouvertement attaqués dans leur fonctionnement par un acteur qui ne prend pas en compte la nécessité des droits de l’Homme, des acquis sociaux ou même de la légitimité du suffrage universel. Longtemps partenaires des gouvernements, cet acteur a largement financé les politiques gouvernementales sans exiger ni revendiquer quoi que ce soit. Mais la patience paie. Aujourd’hui en position de force, il peut désormais imposer sa priorité, le profit financier, sans que le politique puisse s’y opposer. La campagne présidentielle française tourne actuellement sur le budget de l’État. Mais contrairement à ce qui est affirmé, ce débat ne vise pas à savoir comment éviter la faillite à la France. Mais comment conserver un triple A pour emprunter à bas taux… Soit comment conserver un minimum de souveraineté du politique sur le financier.

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