vendredi 25 novembre 2011

Un centriste a déjà gagné la présidentielle


Tandis que François Bayrou annonce sa candidature à l'élection présidentielle, un autre centriste fini de peaufiner sa victoire. Jean-Louis Borloo est en effet le grand vainqueur du suffrage de 2012, car il gagne sans connaître le résultat des urnes. Il ressort en position de force quel que soit la couleur du prochain président de la République.
La situation peut se résumer en deux cas de figure :
Premier cas, la victoire de François Hollande. Les sondages actuels placent cette hypothèse comme la plus probable. Jean-Louis Borloo peut alors se positionner comme le rénovateur de la future droite d'opposition. Centriste, il peut alors déclarer l'échec du système Sarkozy qui, durant 5 ans, s'est tourné vers l'électorat de la droite dure, voire de l'extrême droite, pour construire son socle. Partisan d'une « droite humaniste et sociale », Jean-Louis Borloo deviendra le nouveau représentant d'une droite qui avait prédit l'échec du président sortant mais qui était restée fidèle. En effet, et contrairement à Chevènement en 2002, en retirant sa candidature, il se préserve d'une mise au ban de la droite pour cause de division. Restera en face de lui des personnalités comme Copé ou Lucas qui, pour le premier, représentera sans doute trop l'échec de la droite ; et pour le second, un virage vers l'extrême droite stérile et désavoué par l'électorat traditionnel de l'ex-RPR.
A noter que dans l'improbable victoire du Front National, la position du leader radical est la même. Il se placera comme le futur artisan de la reconstruction d'une droite traditionnelle et républicaine.
Contrer Jean-François Copé
Second cas, la victoire de Nicolas Sarkozy. Cette situation pourrait bien permettre à l'ancien ministre de l'Ecologie d'accéder à l'Hôtel de Matignon. En retirant sa candidature avant même le début de sa campagne, Jean-Louis Borloo se positionne comme un des artisans de la victoire présidentielle. De plus, il laisse libre court aux spéculations sur le poids de son ralliement qu'il pourra alors majorer par rapport au pourcentage réel de bulletins qu'il aurait obtenu face aux urnes. En se présentant comme fidèle malgré les divergences, il offrira au président un soutien dont il aura bien besoin pour faire face aux jeunes loups de son propre parti qui n'attendront pas 2016 pour commencer à se positionner comme futur leader de la droite. Enfin, il permettra surtout à Nicolas Sarkozy de contrer un Jean-François Copé qui n'attend qu'une chose, faire du Sarkozy à la place de Sarkozy (Voir la position du ministre de l'Intérieur entre 2004 et 2007).

jeudi 24 novembre 2011

Train Corail pour… confort et rail

J'ai eu récemment l'occasion de prendre un train corail pour me rendre dans l'Est de la France. Ce type de train, malgré un nouveau nom : Intercités, est surprenant par sa vétusté. Aucune modernisation, pas même un petit rafraîchissement de l'habitacle. Quand on monte dans un corail on se retrouve immédiatement plongé dans les années 80-90. Le design, les couleurs,… La mode de l'époque était ce qu'elle était. Ces voitures qui ont été mise en service entre 75 et 89, ont, pour certains modèles, été modernisées… Il y a en 16 ans.

Le train est à quai. Je me présente devant la porte qui, avant, devait avoir une couleur orange vif. Je m'appuie sur le marchepied qui doit bien laisser un fossé de 15 ou 20 centimètres d'où l'on peut contempler le ballast. A priori, il ne devrait pas avoir trop de personnes âgées dans mon train.

Me voilà dans le wagon, il me faut maintenant trouver ma place. Je lève les yeux et m'apprête à calculer comme dans n'importe quelle rue : pair d'un côté, impair de l'autre. Perdu ! À ma droite les places M-M, 13-11, 18-12, 23-21 etc. À ma gauche, M-M, 15-17, 16-14 etc. J'ai bien fait d'arriver en avance…

Voilà mon fauteuil. Je m'assois. En m'enfonçant toujours plus profondément dans la mousse ramollie comme le vieux divan qui trône chez mes grands-parents, je prends conscience du nombre vertigineux de postérieurs qui ont atterri là où le mien vient de se poser…

Je chasse cette idée ! Vu l'heure (21h), j'ai tout intérêt de faire un petit somme pour accélérer la fin de ce voyage. Peine perdue. Les fauteuils n'ont pas de position inclinée (le divan de mes grands-parents non plus) et le bruit dissuaderait la plupart des insomniaques. Enfin, la porte du sas donnant sur le hall d'entrée ne ferme plus ; ce qui génère un courant d'air froid désagréable. Courant d'air lui-même alimenté par les grilles, situées au niveau des jambes, qui devaient, dans un autre temps, être des chauffages.

Tant pis, je lirai la presse sur mon smartphone. Une lecture toutefois limitée, il n'y a naturellement pas de prise électrique. Face à ce tableau, plutôt glauque (je voyage de nuit), il ne manquait plus que la petite note finale. Celle que tout bon polar ne manque pas de placer quelques parts. Celle qui ne permet plus de douter sur le côté abandonner du lieu… J'ai nommé : le néon en fin de vie qui scintillera durant tout le voyage !

Pour l'anecdote, j'ai même remarqué que les étiquettes indiquant que cette voiture était non-fumeur n'avaient pas été enlevées… Voici donc une pièce du savoir-faire ferroviaire français qui a toute sa place dans un musée.

Bon voyage


mercredi 9 novembre 2011

Démocratie contre Financiocratie

Après l’Irlande, le Portugal, et la Grèce, c’est désormais au tour de l’Italie de voir son chef de gouvernement quitter les manettes. La crise qui touche actuellement les pays européens, est donc sans pitié avec les politiques aux responsabilités. Pour les deux premiers cas, c’est la population, à travers des élections, qui a mis sur la touche les responsables gouvernementaux. Mais en Grèce, le départ de Papandreou n’est pas dicté par le suffrage universel. La mise en place d’un gouvernement d’union nationale, sans lui, est largement imposée par les partenaires européens d’Athènes et la pression des marchés. En Italie, la mise en minorité de Berlusconi a aussi été précédée par une intense pression de l’Europe et des marchés.

Un acteur influent
Quel que soit le jugement que chacun peut avoir sur ces chefs de gouvernements, Il est surprenant de constater que leur départ a toujours été impulsé par un acteur qui désormais ne se cache plus : le marché.
La finance a toujours été un acteur influent dans la sphère politique. N’oublions pas ce qu’est le nerf de la guerre. Mais ces dernières semaines révèlent un changement radical dans le positionnement des grands argentiers mondiaux par rapport à la chose politique. Finie la discrétion, finies les précautions. Les marchés ne sont plus de simples lobbies ou groupes de pressions travaillant dans les coulisses des assemblées. Ils sont aujourd’hui des décisionnaires de la politique, des acteurs puissants.
Naturellement, c’est la situation d’endettement des pays européens qui a permis à la finance de prendre indirectement le contrôle de la Grèce ou de l’Italie. Ces pays ont, comme un ménage surendetté, cédé les clés de la maison au créancier. Il ne faut donc pas s’attendre à ce que les changements de ces derniers jours aillent vers une politique destinée à relancer la croissance. Votre créancier ne vous aidera jamais à retrouver du travail…
La hausse des taux d’emprunt en Italie, au lendemain de l’annonce de la future démission de Berlusconi, révèle d’ailleurs que les créanciers n’ont pas forcément intérêt à voir Rome redresser la tête. Il a été reproché à l’Italie son manque de crédibilité. Aujourd’hui, c’est l’incertitude régnante qui est mise en avant pour justifier de l’attitude des prêteurs. Finalement, entretenir une ambiance de pseudo-crainte n’a pour résultat que la hausse des taux d’intérêts. Donc une hausse des profits. Des profits qui aujourd’hui sont quasi-garantis par le Fond de stabilité européen… Pourquoi s’en priver.

Conserver un minimum de souveraineté
Le bilan de cette situation est que les systèmes démocratiques sont aujourd’hui ouvertement attaqués dans leur fonctionnement par un acteur qui ne prend pas en compte la nécessité des droits de l’Homme, des acquis sociaux ou même de la légitimité du suffrage universel. Longtemps partenaires des gouvernements, cet acteur a largement financé les politiques gouvernementales sans exiger ni revendiquer quoi que ce soit. Mais la patience paie. Aujourd’hui en position de force, il peut désormais imposer sa priorité, le profit financier, sans que le politique puisse s’y opposer. La campagne présidentielle française tourne actuellement sur le budget de l’État. Mais contrairement à ce qui est affirmé, ce débat ne vise pas à savoir comment éviter la faillite à la France. Mais comment conserver un triple A pour emprunter à bas taux… Soit comment conserver un minimum de souveraineté du politique sur le financier.

lundi 7 novembre 2011

Bientôt un Iran nucléaire ?

Le printemps arabe et la crise financière ont mis cette question en retrait. Mais depuis quelques jours, elle revient au galop. Selon le Washington Post, l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) devrait révéler, dans son prochain rapport, que l'Iran maîtriserait l'  "ensemble des étapes nécessaires à la réalisation une bombe nucléaire ". Le journal israélien Haaretz, le Premier ministre, Benjamin Netanyahu, et son ministre de la Défense Ehud Barak auraient déjà acté une attaque préventive contre la République Islamique. À Moscou, le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, considère qu'une intervention militaire serait " une grave erreur " aux "conséquences imprévisibles".
Mais empêcher l'Iran de se doter du feu nucléaire est-il réellement impératif ? Une arme nucléaire iranienne bouleverserait sans aucun doute les géostratégies au Moyen-Orient. En effet, Israël serait, pour la première fois de son histoire, sous la menace directe d'une destruction. Mais il n'est pas pour autant évident que, disposant de la bombe atomique, les responsables iraniens s'empresseraient de s'en servir. En effet, ce changement obligerait sans doute l'État hébreu à changer sa politique diplomatique dans la région. Mais, à l'image de l'équilibre de la terreur qui a permis d'éviter une nouvelle guerre en Europe pendant les années 60 et 70, l'arme atomique iranienne obligera les deux puissances régionales à se mettre autour d'une table plutôt que devant les cartes d'état-major.
Téhéran doit, par ailleurs, faire face à une large contestation intérieure depuis les dernières élections présidentielles de juin 2009. Entachées d'irrégularité, elles ont permis à Mahmoud Ahmadinejad de réaliser un second mandat. Cette situation intérieure, bien qu'étouffée, est un danger bien plus important, pour les ayatollahs, que les menaces extérieures. Porter la responsabilité du déclenchement d'un conflit potentiellement nucléaire pourrait réveiller cette contestation qui provoquerait l'éclatement de la société iranienne. Le phénomène d'union sacré ne serait sans doute pas aussi fort qu'en cas d'agression du pays. Au contraire, la responsabilité du régime serait montrée du doigt.
L'Iran nucléaire ne représente donc pas un risque majeur d'apocalypse. Il est important de se souvenir que L'inde et le Pakistan (allié traditionnel de la Chine) sont tout deux des puissances nucléaires. Or cette nouvelle donne n'a pas rendu cette frontière plus dangereuse… Au contraire. L'arme nucléaire a, dans cette région, permis d'apaiser les relations Indo-pakistanaise.
Il faut enfin remettre en perspective ce que veut dire " ensemble des étapes nécessaires à la réalisation une bombe nucléaire ". La Corée du Nord, qui dispose de la technologie pour fabriquer des armes nucléaires (elle a procédé à son premier essai en 2006), n'en est pas pour autant une menace plus grande.
La dissuasion nucléaire est aujourd'hui plus que jamais un outil de pression diplomatique plus qu'une arme militaire. Reste à savoir comment Téhéran utilisera ce nouveau potentiel diplomatique.

Où est Charlie ?

J'ai finalement réussi à acheter Charlie Hebdo. Je crois que c'est la deuxième fois que j'achète ce journal ; la première fois c'était pendant le tsunami en Asie du Sud-Est. Résultat : je n'aime toujours pas ce canard. Je le trouve mal conçu, fouillis, orienté et, comble, pas très amusant.
Ce fameux numéro qui serait la cause de l'incendie de la rédaction par des inconnus et du piratage du site, m'a tout au plus provoqué un petit rictus ou deux.
Mais je suis tout de même satisfait de l'avoir acheté et espère que ma petite contribution exceptionnelle (2,50 euros) permettra à cet hebdo de continuer à exister. Car rien, aucun discours ne peut excuser ces actes. De nombreux commentaires sur internet déversent leur haine dans un sens comme dans l'autre. Parfois certains proposent une argumentation plus intéressante. Mais aucune ne peut justifier ces faits. Ici, la seule volonté des incendiaires et des hackers, est d'empêcher, de faire taire, de punir.
Nous ne connaissons toujours pas l'identité de ces criminels, mais peu importe. Islamistes, fanatiques, extrémistes de droite… L'important n'est pas les idées qu'ils défendent, mais leur manière de le faire. Ne pas partager des idées ou même les dénoncer est un droit. Tenter de les faire disparaître est délit.
N'oublions pas que Charlie Hebdo est avant tout destiné à faire rire… Contrairement à d'autres publications dont les propos, toujours à la limite de la légalité et parfois au-delà, sont tenus avec sérieux et défendus par leurs auteurs. Minutes, dans son édition du 3 novembre titre en Une : Aïd-el-kébir, comment Guéant cède à l'Islam. Je ne partage pas non plus les idées de cette publication, mais tant qu'elle respecte le cadre légal, elle doit avoir aussi le droit de citer.
Mais le comble est sans doute la fermeture de la page Facebook du journal qui a été bloquée pendant 24 heures pour des raisons douteuses. Pour une entreprise qui a basé sa réussite sur le partage et le réseau…
Finalement la différence réside uniquement entre la dénonciation de propos, l'argumentation d'une position, d'un côté, et la volonté de réduire au silence, de l'autre. Mon choix est fait.

vendredi 4 novembre 2011

Chiner sur le web

C'est au gré d'une de mes balades sur les agrégateurs d'informations (Google Actu, Yahoo,…) que je suis tombé dessus. L'article était intitulé " Les médias étrangers commentent avec passion l'amarrage spatial de Shenzhou-8 et Tiangong-1 ". La première question que je me suis posée était " qui sont ces médias étrangers ? " et la seconde allait de soi : " qui suis-je ? " Une pression de l'index gauche sur le clic droit de ma souris me donnait la réponse. Redirigé vers un site d'actualité en français j'apprenais que " les médias étrangers " étaient l'AFP et que moi j'étais… Bonne question.
Ce site dont le nom, CRI Online, me donnait peu d'informations sur mon identité de lecteur, était alimenté par de l'actualité sur la Chine. " Le président chinois arrive au G20 ", " La chine salue l'accord entre la Syrie et la Ligue arabe ", " Chine : la croissance du secteur non manufacturier ralentit ",… À la lecture de ces titres d'article je pensais avoir trouvé. J'étais un Chinois expatrié ou peut-être un membre de la diaspora.
J'avais tout faux ! En fait j'étais un Africain francophone, peut-être même un Français qui est sensible à l'action de Radio Chine Internationale et de son action visant à " promouvoir la compréhension et l'amitié entre les Chinois et les autres peuples du monde ".
Après une étude un peu plus minutieuse du site je me suis aperçu que ce site était un portail donnant la vérité véridique sur la Chine. J'ai particulièrement apprécié le dossier sur les efforts de Pékin pour améliorer le tourisme, l'économie et l'éducation au Tibet… Pardon, dans la région autonome du Tibet. Je regrette par contre que les parties du site sur l'économie, les ethnies, l'Histoire et la situation actuelle ne fonctionnent pas… Espérons que les administrateurs rétablissent rapidement ce problème.
Il fait bon vivre au Tibet. (Photo RCI)
En quittant le site je n'ai pas pu m'empêcher de penser à Radio Free Europe qui diffusait l'information et les idées occidentales par-delà le rideau de fer (ici ce serait le négatif photo). La comparaison est peut-être malheureuse, mais une promenade sur ce site est suffisamment déroutante pour s'imaginer Tchèque ou Polonais dans les années 80. Si vous voulez faire l'expérience c'est par. Et surtout ne faites pas attention, dans l'Empire du Milieu, tout le monde a le sourire…

jeudi 3 novembre 2011

Grèce, le remède qui tue (2e partie) : la tragédie grecque

Il y a une semaine, à l'issue de négociations acharnées, les responsables politiques de l'eurozone, validaient un plan de sauvetage de la Grèce assorti d'un renforcement du Fond européen de stabilité financière.
Pour faire simple, ce plan vise à faire disparaître la moitié de la dette d'Athènes auprès des banques ; soit 100 milliards d'euros. Parallèlement, les pays de la zone euro engageront 130 milliards d'euros, sous forme de prêts.
Après une nuit de négociation, les leaders européens se félicitaient, jeudi 27 octobre, d'avoir résolu la crise. Un engouement qui précédait l'euphorie des bourses qui regagnaient parfois jusqu'à 6% avec des pics pour les valeurs bancaires atteignant près de 20% en une journée.
Cette suppression d'une partie du passif grec révèle que les responsables européens ont compris que la pire des austérités ne serait pas suffisante pour redresser la barre des finances grecques et qu'elle ne faisait qu'aggraver la situation. Il est d'ailleurs cocasse de constater que cette effacement de dette, aujourd'hui défendu par le chef de l'Etat, avait été prôné le 18 septembre par le directeur général du FMI : … Dominique Strauss-Kahn. A l'époque François Fillon avait qualifié cette idée "d'irresponsable" et affirmé que cela reviendrait à ce "que le laxisme budgétaire d'un Etat soit financé par les autres".
Retour case départ
Mais tel oedipe face à son destin, la Grèce n'est toujours pas sortie d'affaire. Alors que l'on pensait que le plus délicat était derrière nous, le Premier ministre hellène annonce que l'accord européen sur la dette grecque fera l'objet d'un referendum, remettant en question la totalité du sauvetage qui devait stabiliser les marchés européens et mondiaux... Retour case départ.
Bien que l'idée d'interroger la population sur ce nouveau plan d'austérité semble légitime, elle ne peut pas être proposée maintenant. On ne demande pas à une victime d'accident de la route si elle préfère l'hôpital ou la clinique...
«Enlevez l'euro aux Grecs»
Cette décision qui a surpris la communauté internationale ne fait qu'entretenir un ressentiment sur la Grèce de la part de ces partenaires. Les déclaration de Sarkozy et Merkel, la veille du G20, l'atteste : "Il faut que l'euro reste stable, nous souhaitons atteindre cet objectif, de préférence avec la Grèce plutôt que sans la Grèce, mais la mission première est de conserver l'euro comme monnaie stable", a déclaré Angela Merkel à l'issue d'une réunion sur la Grèce à Cannes. "Nous souhaitons poursuivre l'euro et l'Europe avec nos amis Grecs. Nous avons tout fait pour cela, absolument tout fait, mais il y a des règles qui fondent le pacte de solidarité. C'est au Grecs et à eux seuls maintenant qu'il appartiendra de décider s'ils souhaitent continuer l'aventure avec nous ou pas", a renchérit le Président français. Des propos mesurés mais clair. Si la Grèce vote non elle se débrouillera seul. La presse d'outre-Rhin est beaucoup moins mesurée : «Enlevez l'euro aux Grecs», titre Bild qui poursuit : «Maintenant, ça suffit! Nous garantissons des centaines de milliards d'euros pour sauver les Grecs en faillite, et maintenant, ils veulent d'abord décider par référendum s'ils vont faire des économies. Madame Merkel, nous voulons aussi un référendum! Nous voulons aussi décider si nous continuons d'aider les Grecs avec des milliards». Quelle que soit la sortie de crise, le grand perdant sera la population grecque qui, en plus de difficultés économiques inédites depuis la fin de la Seconde guerre mondiale, va devoir supporter un ressentiment du reste de l'Europe. Cette conséquence, elle, ne s'effacera pas aussi vite qu'une centaine de milliard d'euros de dette.

mercredi 2 novembre 2011

Redistribuer les cartes

L'entrée de la Palestine en tant que membre à part entière à l'Unesco révèle ou confirme un changement important de la géopolitique mondiale. En votant favorablement par 107 voix pour 52 abstentions et 14 contre, les pays membres de l'Organisation des nations unies pour l'éducation la science et la culture, ont fait fi des conséquences directes qu'engendrerait ce scrutin.
En effet, les États-Unis ont immédiatement réagi en suspendant leur participation à l'organisation. Soit un manque à gagner de 60 millions de dollars que le Département d'État devait verser en Novembre. Soit plus de 17 % du budget total de l'Unesco.
Mais en coulisse de l'organisation onusienne, ce vote est sans aucun doute une nouvelle défaite de la diplomatie américaine sur le dossier israelo-palestinien. En effet, cette reconnaissance internationale de la Palestine comme un État révèle que les USA n'ont plus l'influence et les moyens de pression dont ils disposaient auparavant.
Perte de crédibilité
Il faut noter également que l'intégralité des BRIC (Brésil, Russie, Inde, Chine) a voté favorablement à cette adhésion. Plus qu'un symbole, ce vote des nouvelles puissances dans le sens d'une plus grande reconnaissance de la Palestine illustre l'affaiblissement de la première puissance mondiale sur ces partenaires économiques et stratégiques. Cette nouvelle étape, après le camouflet de la déclaration de candidature de la Palestine pour devenir un État membre à part entière des Nations Unies, accentue la perte de crédibilité américaine, et plus largement occidentale, sur la scène diplomatique mondiale.
L'arrivée d'Obama à la Maison Blanche avait fait espérer d'une diplomatie plus nuancée des USA sur le Proche-Orient. Trois ans après, les faits indiquent le contraire. La position américaine restant partiale, le règlement de ce conflit pourrait bien passer par d'autres capitales comme Brasília, Pékin ou Moscou. À moins que ce conflit qui dure depuis plus d'un demi-siècle ne se transforme en nouvelle zone de cristallisation des tensions entre anciennes et nouvelles grandes puissances.
Le vote de l'Unesco révèle finalement plus la distance que semble vouloir prendre les BRIC vis-à-vis des États-Unis, que le rapprochement de la Palestine vers un statut d'État reconnu à l'ONU. Mais, Mahmoud Abbas a bien perçu cette volonté et compte bien exploiter au maximum cette redistribution des cartes.
Pierre Silvain

mercredi 26 octobre 2011

Qu’importe l’islamiste, pourvu qu’il soit démocrate

Contrairement aux décisions militaires et aux offensives, les processus politiques sont relativement lents. Que ce soit en Tunisie ou en Libye, la démocratisation et de libéralisation de la société ne se fera pas en quelques semaines. Il est donc indispensable de s'armer de patience avant de juger de l'orientation que ces pays choisiront.

Le spectre du terrorisme et de l'extrémisme

La victoire du parti Ennahda lors de l'élection de l'assemblée constitutante tunisienne inquiète. Les propos de Moustapha Adbeljalil, président du Conseil national de transition libyen, dimanche 23 octobre effraient : "En tant que nation musulmane, nous avons adopté la charia islamique comme source du droit, donc n'importe quelle loi contredisant les principes de l'islam est légalement nulle." La peur de l'islamisme radical s'est depuis emparée des occidentaux qui voient dans les résultats du scrutin tunisien, comme dans les propos du leader libyen, le spectre du terrorisme et de l'extrémisme.
La réaction de la diplomatie française comme celle de la plupart des responsables européens est restée mesurée. "Nous serons vigilants à ce que les valeurs que nous avons défendues aux côtés du peuple libyen soient respectées : l'alternance démocratique, le respect de la personne humaine, l'égalité des droits entre l'homme et la femme. Pour nous c'est absolument essentiel", a déclaré le ministre des Affaires étrangères le 24 octobre. C'est d'ailleurs cette vigilance qui devrait être appliquée par l'ensemble des responsables politiques et des médias face aux situations tunisiennes et libyennes.

 

Le processus démocratique doit faire son œuvre
Concernant le scrutin tunisien, il est important de rappeler que le parti Ennahda se revendique comme modéré. Durant toute la campagne, ses candidats ont rappelé leur attachement à la démocratie récemment acquise et à la préservation du droit des femmes. Ali Larayd, membre du comité exécutif d'Ennahda, a également déclaré, lundi, que son parti était "prêt à former une alliance avec le Congrès pour la république de Moncef Marzouki et l'Ettakatol de Moustapha Ben Jaafar puisque leurs opinions ne sont pas éloignées des nôtres et que ces deux partis ont obtenu un grand nombre de suffrages." Ces deux partis sont laïques. Personne ne peut raisonnablement s'alarmer de cette victoire d'Ennadha. Le processus démocratique doit faire son œuvre. Il est également juste de rappeler que de nombreux partis d'Europe se revendiquent d'une religion comme l'Union chrétienne-démocrate d'Allemagne dont est issue Angela Merkel. La Turquie est aussi gouvernée par un parti dit islamiste, l'AKP et, en dehors de tout jugement sur sa politique, il est difficile de le critiquer sur son attachement à la démocratie.
En Libye, la patience est d'autant plus de mise qu'aucun scrutin n'a encore eu lieu. Les propos de Moustapha Adbeljalil n'engagent finalement que lui et son gouvernement de transition. Pour l'heure, personne ne peut dire comment l'électorat libyen se comportera lors des élections qui doivent se tenir dans huit mois.
Se focaliser sur le seul terme d' "islamisme" alors même que ces populations découvrent à peine le jeu du processus démocratique est une erreur. Chacun doit pouvoir effectivement défendre ses idées. La force de la démocratie est justement que la multitude des points de vue rend obligatoire le consensus et limite les décisions extrémistes.
Pierre Silvain

mardi 25 octobre 2011

Grèce, le remède qui tue (1re partie)

Les Européens, et le reste du monde, observent depuis plusieurs mois les râles de l’économie grecque et l’attitude des responsables de l’UE postés et prostrés, à son chevet. Cette situation, décrite comme le déclencheur potentiel d’une crise mondiale plus grave que celle qui a frappé l’économie mondiale en 2008, effraie et inquiète par ces conséquences sur les marchés, son impact sur la croissance du PIB, sur le moral des industrielle, sur les perspectives conjoncturelle...  L’ensemble du dictionnaire d’économie pourrait être décliné.
Un mot, en revanche, revient partout : austérité. Les Grecs doivent se serrer la ceinture. A priori, cela semble légitime. Ils se sont mis dans la m… Nous (Européens) devons les aider. Il faut donc que ces cigales apprennent à devenir des fourmis et PAYENT les efforts que nous devons faire à leur place.

Les écoles publiques ne reçoivent plus de manuels scolaires

Ce discours, véhiculé par nos représentants est inique et absurde. Il est inique car il passe sous silence les efforts terribles que la société grecque a déjà consenti. En effet, vivre en Grèce en 2011, c’est avoir accepté en moins d’un an :
- Une réduction des salaires et des retraites atteignant jusqu’à 30 % ;
- Une baisse du salaire minimum à 600 euros ;
- Une hausse des prix au cours des quinze derniers mois (fioul domestique : + 100 % ; essence : + 100 % ; électricité, chauffage, gaz, transports publics : + 50 %).
- Près d’un tiers des commerces du pays ont fermé leurs portes. Sur ceux qui ont pour l’instant survécu, 30 % ne sont plus en mesure de payer les salaires.
Un juriste viennois, disposant d’une résidence en Grèce, interrogé par Courrier International s’insurge face à la situation : “ pour déposer une plainte au commissariat, il faut payer sur-le-champ 150 euros. Dans le même temps, les policiers sont obligés de se cotiser pour faire le plein de leurs voitures de patrouille. Un nouvel impôt foncier, associé à la facture d’électricité, a été créé. S’il n’est pas payé, l’électricité du foyer est coupée. Depuis plusieurs mois, les écoles publiques ne reçoivent plus de manuels scolaires, l’État ayant accumulé d’énormes dettes auprès des maisons d’édition. On ignore comment les écoles – surtout celles du Nord – vont régler leurs dépenses de chauffage. ”

Un recul de plus de 12 % en 4 ans

Les décisions, prises dans un laps de temps aussi court, ont eu des conséquences catastrophiques sur la société. Certains chiffres, publiés récemment, font froid dans le dos. Depuis le début de l’année, le nombre de suicide a augmenté de 40 % par rapport à la même période en 2010. Le taux de chômage a doublé en deux ans, à plus de 16 %.
Face à ce bilan, il apparaît déplacé de critiquer les efforts consentis par les Grecs pour que les autres Européens consentent à leur faire… Un prêt.
Le plus ubuesque et tragique dans cette situation n’est pourtant pas là. En effet, les décisions en matière d’austérité exigées par les partenaires de la Grèce vont avoir des conséquences diamétralement opposées à celles espérées initialement. En obligeant l’État Grec à faire des économies, l’objectif était d’assainir ses finances pour lui permettre de sortir de la spirale de l’emprunt. Mais les exigences ont été telle, qu’elles ont pour l’instant comme seul résultat la destruction de l’économie du pays. Le PIB a reculé de 2 % en 2009, 4.5 % en 2010, 5.5 % en 2011 et les prévisions indiquent un recul de 2.5 % pour l’année 2012 (chiffre plutôt optimiste). Soit un recul de plus de 12 % en 4 ans !
Sachant que les rentrées fiscales d’un État sont fonction de la croissance du pays, comment Athènes pourrait décemment rembourser sa dette dans cette situation ?
Pierre Silvain

lundi 24 octobre 2011

Kadhafi, à sa place

Syrte, après plus d'un mois de siège. (Photo DR)

Kadhafi est mort. Vu le nombre de vidéos et de photos qui ont circulé sur nos écrans, depuis jeudi 20 octobre, personne au quasiment ne peut ignorer cette information. Certains, gênés par la violence de ces images, ont affirmé qu'il n'était pas nécessaire de montrer l'ensemble des clichés et vidéos amateurs disponibles. Certes visionner les derniers instants du dictateur libyen est une expérience difficile voire insoutenable. Mais je ne pense pas que l'on pouvait faire l'impasse dessus. Cette violence n'est que le reflet du réel. La mission des journalistes est justement de rester le plus fidèle et le plus proche de cette réalité, fût-elle violente. 
Sur la photographie ci-dessus, chacun peut constater l'ampleur des combats et les conséquences sur une ville comme Syrte. Pouvons-nous nous contenter de mots, de qualificatifs, pour réaliser l'ampleur de ce qui s'est passé là-bas ? Pouvons nous faire confiance à notre seule imagination pour se représenter la destruction qu'engendre un mois de siège? Non. Il n'y a que l'image qui nous permet d'évaluer et de comprendre ce qu'ont pu vivre les habitants de Syrte et les combattants des deux camps.
Devant les yeux de tous 
Je pense que ce qui est valable pour cette ville l'est aussi pour la chute d'un dictateur. Et je ne parle même pas de la fonction de ces images pour la population libyenne elle-même. En effet, après 42 ans de règne, l'image du cadavre de Kadhafi donne aux Libyens la garantie qu'une page se tourne.
En revanche, je suis surpris du peu de précautions que certains confrères ont pris pour diffuser ces images. Bien qu'elles soient, à mes yeux, indispensables pour la compréhension de ce qui se trame de l'autre côté de la Méditerranée ; elles ne peuvent évidemment par être mis devant les yeux de tous.
Voir le cadavre de Kadhafi doit résulter d'une volonté propre et ne doit pas être imposée. Quand un individu décide de regarder les actualités télévisées, d'ouvrir un journal ou d'aller sur des sites d'informations, il fait le choix implicite de se confronter à la réalité. En revanche, mettre le cadavre de Kadhafi en Une d'un journal ou d'un portail web du type Yahoo, Orange etc, c'est l'imposer. C'est obliger la population à se confronter avec l'horreur sans lui demander son avis... Ni son âge.
Informer ne doit pas se faire avec le souci de protéger son lectorat ou son audimat. J'en suis persuadé. Mais l'information, particulièrement dans ce cas précis, ne peut pas être diffusée sans le souci de protéger les plus jeunes. L'actualité n'est pas et ne sera jamais tout public. Elle mérite de savoir prendre du recul. De la distance par rapport aux propos comme aux images.
Pierre Silvain

Une affaire de goût

Oubliez les capes et les épées. Laissez tomber les chapeaux pointus et les balais. La tendance actuelle n’est plus aux sous-produits du Seigneur des anneaux ou aux apprentis sorciers sauce Potter… Bienvenue dans l’ère des mangeurs de cerveaux, bienvenue chez les zombies.
Ces êtres morts qui refusent de rester tranquillement dans leur caveau ou cercueil et passent leur temps à chercher un vivant pour lui manger l’encéphale, ont la côte. Les zombies ou morts vivants ne sont pourtant pas une création récente. Dans le cinéma ils entrent dans la postérité grâce à George Andrew Romero qui réalise en 1968, La nuit des morts vivants. Devenu le spécialiste incontestable en la matière, le réalisateur américain effraie les amateurs depuis plus de 40 ans. L’avènement du jeu vidéo, dans les années 90, a permis aux zombies de quitter la pellicule pour étendre leur influence jusque dans les chambres des enfants… Et ces enfants sont devenus grands.
Rouge hémoglobine
Il y a 10 ans, toutes les grandes agglomérations européennes vivaient, une fois par an, au rythme des love parades. Ces manifestations étaient l’occasion, pour la communauté gay, de se montrer au grand jour et de revendiquer ses droits. Aujourd’hui, de plus en plus de grandes villes connaissent une fois par an un défilé beaucoup moins coloré, si ce n’est de rouge hémoglobine. Les zombis parades attirent toujours plus de monde à la façon d’un grand carnaval morbide. Question revendication, en revanche… Nous pouvons d’ailleurs nous interroger sur le sens du succès des zombies dans nos sociétés. Carnaval, dès le Moyen-Age, avait pour but d’inverser les rôles, de chambouler l’ordre social de manière ponctuelle pour faciliter le retour à un quotidien inégalitaire le reste de l’année. Mais que représente cet engouement pour les zombies ? Que révèle-t-il de notre société ?
Dans les sciences
Arnold T. Blumberg, auteur de du livre Zombiemania : 80 movies for die, expliquait au lancement d’un cours sur le zombie à l’université de Baltimore, en septembre 2010 : “Cela fait partie de la mentalité américaine. Les zombies fonctionnent comme une allégorie de toutes sortes de choses qui se passent dans notre pays, qu’il s’agisse de la menace du communisme pendant la Guerre froide ou de nos craintes au sujet du bioterrorisme en 2010. Il est relativement facile de connecter les zombies à ce qui se passe dans la culture”.
Car le zombie ne se contente plus du cinéma, de la littérature ou des jeux vidéo ; il est présent dans les universités et dans les sciences. Dans un article publié sur le site Slate.fr, Julia Coulibaly détaille : “En 2009, le Dr. Steven C. Schlozman […] propose d’utiliser les outils les plus avancés de la neurobiologie pour disséquer le cerveau d’un zombie. […] En 2011, c’est le jeune neuroscientifique Bradley Voytek qui décide de se prêter au jeu des zombies studies. Lors de la Nerd Nite de Los Angeles, il tente de répondre à la question métaphysique suivante : qu’est ce qui fait qu’un zombie est un zombie ? ”
Les sciences médicales ne sont pas les seules à être progressivement infestées par le mal. La géopolitique et la géostratégie sont, elles aussi, touchées. En 2011, Princeton University Press, publie Theories of International Politics and Zombies.
Vous ne pouvez pas tirer dans la tête de la crise financière
Derrière cet engouement scientifique, se place clairement l’idée de proposer des cas médicaux ou géopolitiques complexes et inconnus susceptibles de captiver un auditoire d’étudiants et de les inciter à travailler sur une situation inédite les obligeant à mettre de côté les modèles connus.
De manière plus élargie, le retour du zombie depuis le début des années 2000 (et l’avènement d’un monde multipolaire et mondialisé) représente l’ultime adversaire en face duquel les Hommes ne peuvent que s’unir et se rassembler autour d’une même cause. Max Brooks, auteur de Guide de survie en territoire zombie et World War Z : Une histoire orale de la guerre des zombies, actuellement adapté au cinéma résume le succès de ce monstre : « Les zombies sont une menace apocalyptique, nous vivons des moments d’angoisse apocalyptique et nous avons besoin d’un vecteur dans lequel se fondent ces inquiétudes.
Le zombie est une façon pour nous d’explorer des catastrophes massives d’une façon rassurante. Vous ne pouvez pas tirer dans la tête de la crise financière, mais vous pouvez le faire avec un zombie. »
Pierre Silvain

mardi 18 octobre 2011

Après l'anti-sarkozysme, l'anti-hollandisme

Je suis surpris. Surpris de constater que, depuis dimanche, la droite française s’attache à démonter point par point l’ensemble du programme socialiste défendu par François Hollande. Je suis étonné de voir la majorité organiser une convention, rien que ça, pour discuter, disserter, débattre… Du projet socialiste. À grand renfort de plateau télé et d’intervention dans les médias, les leaders du parti présidentiel vont faire entendre leur voix en parlant des socialistes.
Sur toutes les ondes, dans tous les journaux, j’entends que la droite va reprendre le crachoir, monopolisé par le PS durant les primaires. Mais s’ils le reprennent pour nous parler de la gauche, autant le leur laisser.
Depuis 2007, l’UMP s’est élevé contre l’anti-sarkozisme primaire de l’opposition. Arguant que derrière le « tout sauf Sarko », il n’y avait pas de programme, tandis qu’eux proposaient une vraie vision de l’avenir, un vrai programme politique. Peut-être ont-ils eu raison. Une chose est sûre, c’est qu’aujourd’hui, ils ont tort. Plutôt que de nous ressasser que le programme PS et ceci, que le programme de PS et cela, que François Hollande y dit n’importe quoi… L’UMP ferait sans doute mieux de se concentrer sur ses propres propositions plutôt que de se glisser dans un costume qu’ils ont eux-mêmes critiqué pendant 4 ans.
Pierre Silvain

lundi 17 octobre 2011

Mélenchon, un keynésien d’hier

Interrogé lundi 17 octobre sur France Info, Jean-Luc Mélenchon affirmait : « C’est quand même incroyable de voir qu’on passe pour un révolutionnaire quand on est simplement keynésien ; où on dit il faut partager, c’est ça qui va faire respirer l’économie. » Le leader du Front de Gauche défend dans son programme une taxation du capital à hauteur de celle du travail et « une augmentation des recettes [de l’État], en prenant à ceux qui ont beaucoup. » Toujours selon Jean-Luc Mélenchon, cette augmentation des recettes permettra de valider une politique publique active. Mais ce programme correspond-t-il à une politique keynésienne ?
Les politiques économiques dites keynésiennes partent du postulat que le marché ne conduit pas à l’optimum économique. Afin de parer ses accrocs, la puissance publique se doit d’intervenir pour protéger l’équilibre général. Pour ce faire, le gouvernement doit alors pratiquer une politique budgétaire expansionnisme, c’est-à-dire de combler, par la dépense publique, le déficit d’utilisation du potentiel économique. Autrement dit, passer d’un équilibre bas (faible demande, faible offre, chômage et sous-utilisation du capital, moral en berne conduisant à des anticipations négatives) à un équilibre haut (plein emploi, demande et offre plus forte, anticipations positives restaurant la croissance)
Création de déficit
Les outils à la disposition de la puissance publique pour mettre en place ce type de politique sont multiples. Les minima sociaux et le Smic peuvent être un moyen de relancer la demande des ménages les plus fragiles, mais peuvent aussi obliger les entreprises à augmenter leurs prix pour faire face à cette hausse de leur charge.
L’État peut aussi favoriser l’innovation, et investissement, via des mesures incitatives telles que des défiscalisations, une diminution de l’Impôt sur les sociétés. Cette mesure a néanmoins eu que peu de retombées malgré des systèmes multiples d’aides et des organismes de financement largement doté (Oséo).
Enfin, un État peut jouer sur le taux directeur de la banque centrale pour inciter à la consommation ou à l’épargne. Cet outil n’est plus aujourd’hui à la disposition des gouvernements de l’Euroland. La banque centrale européenne décidant seule de la politique économique de la zone.
Il ne reste donc que peut de possibilité à Jean-Luc Mélenchon pour mettre en place son programme. En premier lieu la dépense publique qui contrairement à ce que prône la théorie, ne pourra pas s’appuyer sur une création de déficit. La France ne pouvant pas raisonnablement creuser encore son déficit. Le leader de gauche ne pourra donc financer son programme qu’avec des recettes fiscales nouvelles qui, même si elles sont importantes pourront difficilement supporter un vaste plan de relance basé une stimulation de la demande.
Cette politique sera d’autant moins favorable à l’économie française si elle n’est pas mise en place en concertation avec autres membres de l’Euroland. (voir Démondialisations ou des mondialisations).
Entièrement interdépendantes
Jean-Luc Mélenchon appuie bien son programme sur des éléments constitutifs de la politique keynésienne, mais il fait face à un large problème pour le mettre en application. Les économies européennes et mondiales sont aujourd’hui entièrement interdépendantes. La mise en place d’une politique économique nécessite par conséquent d’être lancée en concertation pour ne pas risquer de voir ses bénéfices se volatiliser. L’exemple du plan de relance de 1981 l’atteste… Jean-Luc Mélenchon devra donc d’abord s’entendre avec l’Europe avant de mettre en place sa relance. Une idée défendue par Arnaud Montebourg.
Pierre Silvain

jeudi 13 octobre 2011

Les nombres de l’or

La nature respecte un certain nombre de loi universelle : la relativité, la gravité ou la mécanique quantique. Parfois, de manière quasi magique, il apparaît une variable mathématique respectée, sans raison apparente, par la physique ou la biologie. C’est le cas du nombre d’or ou 1,618 033 989.
Moins connue, la loi de Benford, énonce une règle invariable sur l’apparition des chiffres dans une liste statistique : le 1er chiffre non nul le plus fréquent est 1, sa fréquence d’apparition est de 33 % du total des observations. Le 2 est lui plus fréquent que 3 et ainsi de suite jusqu’au 9 qui, lui, n’a plus qu’une probabilité d’apparition de 4,6 %. Cette loi se vérifie dans la nature comme en astronomie mais également dans des domaines moins universels comme dans votre déclaration d’impôt. Jialan Wang, professeur de finance à la Washington University de Saint Louis, affirme que cette règle est en effet utilisée dans de nombreux pays pour lutter contre la fraude fiscale. Elle permettrait de vérifier si un compte respecte bien les fameuses constantes statistiques.
Crise économique
Ce qui est intéressant, c’est que la scientifique américaine s’est lancée dans une étude titanesque où elle prend pour base les données de près de 20 000 entreprises sur un demi-siècle d’activité. Les résultats révèlent deux choses importantes. La première est que, dans la durée, les comptes de ces entreprises s’éloignent de plus en plus de la sacro-sainte loi. La seconde conclusion est que cet éloignement est plus prononcé lors de crises économiques. (Pour les entreprises de la high-tech lors de la bulle spéculative ou encore l’ensemble pour la crise de 2008).
Aucune conclusion radicale ne peut être prise à la lumière de cette recherche. Mais elle illustre gravement une situation économique de plus en plus détachée du « processus naturel de génération de données ». Vulgaire maquillage des données, déréglementations entraînant un éloignement de la comptabilité vis-à-vis de la création réelle ou virtualisation d’une partie des activités… Les causes peuvent être multiples et ne sont pas arrêtées. Mais les conclusions indiquent qu’en tout état de cause, nous n’avançons pas dans le bon sens…
Pierre Silvain

mardi 11 octobre 2011

Démondialisation ou des mondialisations

Avec le premier tour des primaires du PS et l’éclosion sur la scène politique d’Arnaud Montebourg, des idées politiques peu répandues ou faiblement médiatisées sont entrées dans la lumière du débat politique national.
Le plus important concept est bien sûr celui de démondialisation qui, depuis dimanche 9 octobre, alimente abondamment les discussions et les pages des journaux. Mais que cache ce terme ? En premier lieu, le terme peut être perçu comme l’opposé de la mondialisation. Comme l’antimatière face à la matière. L’Homme mondialiserait et démondialiserait comme il monte et démonte un mécano. Malheureusement ou heureusement, question de point de vue, le concept défendu par le député de Saône-et-Loire n’est en rien une déconstruction méthodique du système économique, financier et social qui régit la planète.
Démondialiser consiste à travailler sur deux points fondamentaux du système économique. D’abord, relocaliser les entreprises et les emplois. Ce type de politique n’est possible que dans un espace qui réalise en interne plus de la moitié de ses échanges. En effet, l’incitation à recentraliser passe par une taxation des marchandises produites à l’extérieur de cet espace. Or, dans le cas de la France, chacun peut relever que la balance commerciale est déjà largement déficitaire. Une politique protectionniste à l’échelle française provoquerait une hausse des prix généralisée et une réaction de nos partenaires européens qui ferait exploser le déficit commercial. En mettant en place des barrières douanières aux frontières du continent, l’Europe, qui réalise près des deux tiers de ses échanges en interne, protégerait efficacement son économie et son modèle basé sur une forte protection sociale. Ce système pourrait indirectement favoriser l’environnement et réduisant les transports de marchandises. "Produire à 20 000 kilomètres n’a aucun sens à un moment où l’atteinte à l’environnement est devenue un problème pour chacun des habitants de la planète", explique Arnaud Montebourg.
La démondialisation, c’est aussi « Sécuriser la finance : reréguler avec force le système financier pour éviter les dérives qui ont conduit à la crise. » L’objectif ne peut se réaliser qu’avec un accord mondial. Les flux financiers ne pourront être maîtrisés que si les plus grandes puissances économiques mondiales s’entendent. La mise en place d’une taxe Tobin, si elle n’est pas globale aura pour conséquences de faire fuir le capital et par conséquent de mettre en difficulté l’économie réelle.
La finalité de la démondialisation comme le mot peut faire penser à tort n’est pas de revenir en arrière mais de proposer un système économique mondial basé sur des grands ensembles économiques intégrés dans lesquels les règles de la mondialisation pourraient fonctionner mais qui offrirait l’avantage de protéger les différents espaces de la concurrence extérieure. Les protectionnismes nationaux du 19e et 20e siècles avaient pour mission de protéger les économies nationales de la concurrence extérieure afin de lui laisser le temps de se développer et de devenir suffisamment compétitive. La démondialisation est un protectionnisme qui permettra aux économies européennes de se protéger le temps que les autres grands ensembles économiques mondiaux les rejoignent en matière de protection sociale et de niveau de salaire.
Pierre Silvain

lundi 10 octobre 2011

Yahoo est-il un site de racistes ?

"Voila ce que c'est de vouloir imposer la démocratie partout; Des peuples sauvages ont besoin d'une dictature pour les dresser et les rendre un peu moins violents" Alice au sujet d'un attentat qui a fait 18 morts en Irak le 30 septembre. "Et oui la tolérance Musulmane, c'est de tuer les chrétien et autres ils pratiquent une forme de cannibalisme ils ce tuent entre eux: Merci...Merci qui ? : Allah bien sur" Wallabi concernant les affrontements entre Coptes et militaires qui ont fait 24 morts en Égypte le 9 octobre. "Dans les congélateurs de mon bunker, j'ai un stock­ d'immigrés.hier j'ai bouffé un foie­ d'arabe à la vinaigrette. j'ai A-DO-Ré !" . Boursicreppe au sujet d'un article sur la préparation de l'équipe de France avant sa rencontre avec la Bosnie. Voici un très léger florilège de commentaires que l'on peut trouver à la suite des articles visibles sur les pages du site Yahoo.fr
Habitué de l'agrégateur depuis plus de 10 ans, je suis chaque jour un peu plus étonné de voir la littérature que proposent les utilisateurs du site. Certes, ce type de propos a toujours existé sur le site, mais leur violence et surtout leur fréquence est aujourd'hui insupportable. Je ne peux pas croire, quand je lis les commentaires de certains internautes, que les modérateurs font ou essaient de faire leur travail. Comment un site aussi populaire peut-il laisser des injures, des appels à la haine, des diffamations de ce type prospérer sans essayer de lutter contre. 
Une tribune sale
Après 10 ans d'utilisation, je maîtrise le site et sais exactement où cliquer pour trouver le type d'info que je cherche. Mais je suis aujourd'hui un utilisateur par défaut qui se cherche une nouvelle page d'accueil moins haineuse et plus respectueuse du droit. 
L'exemple de Yahoo n'est pourtant pas isolé et d'autres internautes doivent ressentir la même exaspération que moi face à l'inaction des modérateurs. Sous couvert de liberté d'expression, le web offre aujourd'hui une tribune sale à des individus qui seraient punis pour des propos bien moins nauséabonds dans tous les autres médias. Chacun doit se souvenir que le web reste un espace public et que cet espace est, comme tous lieux publics, régit par des règles nous permettant de vivre au mieux en société. Je ne suis pas sûr que nos trois auteurs cités ci-dessus se seraient exprimés de la sorte devant un auditoire ou sur une place. S'exprimer, oui. L'assumer, non.
Leurs responsabilités
Face à ce constat (certains "posteurs" utilisent même plusieurs pseudonymes pour ne pas entacher leur identifiant principal), Je suggère à Yahoo et aux autres agrégateurs et sites d'informations de permettre aux utilisateurs de retrouver l'adresse mail des commentateurs. Ce changement, Facilement réalisable, placera Alice, Wallibi, Boursicreppe et les autres devant leurs responsabilités. Je ne serais pas étonné de voir dès lors mon agrégateur préféré redevenir fréquentable.

Adroite ou maladroite

Quand Jean-François Copé explique, au journal télévisé, le soir du premier tour des primaires socialistes, que le nombre de votants à ce nouvel exercice démocratique ne représente que 4% des électeurs ; personne ne s'étonne. Comparés aux propos d'autres leaders de droite, saluant cette méthode de désignation et son « succès relatif », ceux du chef de l'UMP peuvent être perçus comme décalés. Mais finalement, personne n'en attendait moins de la part du parti de la majorité.
Il est d'ailleurs plus surprenant d'entendre François Fillon, de bonne fois, expliquer l'intérêt de ce « processus moderne » de désignation. Le Premier ministre est bien sûr en droit d'approuver le système des primaires. Mais qu'il le fasse la semaine où le PS propose aux Français de venir aux urnes pour désigner leur futur champion est étonnant.
En effet, le processus des primaires semble aujourd'hui faire la quasi-unanimité dans l'Hexagone. Politisés ou pas, les Français semblent valider ce nouveau système de désignation qui réouvre la politique en s'affranchissant des sphères militantes. La majorité ne peut donc qu'observer cet engouement vis-à-vis d'un système dont elle est privée pour cause de président sortant. La situation est donc délicate car critiquer l'exercice, c'est prendre le risque d'aller à contresens de la volonté générale et même des statuts de L'Union pour un mouvement populaire (cf Copé). Rappeler que L'UMP dispose déjà de cet outil de désignation est également risqué. Un document n'a jamais autant de poids qu'une action. Il est facile de se demander pourquoi l'UMP n'a jamais réalisé de primaires. L'effet « moi je... » peut aussi agacer les Français qui, quelle que soit leur opinion, apprécie le retour à de vrais débats d'idées à gauche (Le succès des émissions retransmettant les échanges entre les 6 candidats l'atteste). Enfin, saluer l'exercice peut apparaître comme surprenant à 6 mois du scrutin présidentiel. N'est-ce pas donner le bâton pour ce faire battre? N'y a-t-il pas une once de défaitisme dans ce discours?
Bien sûr la droite aura ses primaires. Bien sûr l'exercice n'est pas réservé aux partis de gauche. Mais à l'heure où le président sortant est au plus bas dans les sondages. Au lendemain d 'une défaite historique au Sénat. A la veille d'un combat qui sera sans aucun doute difficile et serré. Voir certains leaders de droite et le second personnage de l’État féliciter le futur adversaire indique qu'ils ont peut-être déjà baissé pavillon pour le round de 2012. En revanche, leur attitude révèle sûrement qu'ils se positionnent déjà pour celui de 2017.
Pierre Silvain